
Ce texte explique une technique de relèvement applicable aux bateaux rapides. Elle permet d’utiliser des cartes papier lorsqu’il n’y a que peu ou pas d’espace pour travailler sur les cartes. Elle est utile quand l’afficheur de cartes électroniques ne fonctionne pas, ou lorsqu’il est nécessaire de vérifier la validité d’un relèvement électronique.
J’ai appris cette technique en lisant le livre Coastal and Offshore Navigation. Elle est utile sur les bateaux à moteur ou les bateaux dotés d’une coque gonflable (par exemple, les zodiacs). Elle est adaptée à la haute vitesse, mais nécessite de la planification.
La technique de relèvement traditionnelle
La technique de relèvement traditionnelle consiste à trouver le relèvement de deux amers (ou plus), puis à identifier la position du bateau à l’intersection des deux lignes de position. Un exemple est illustré dans la pseudo-carte ci-dessous. Elle utilise la convention d’annotation uniforme de Voile Canada. L’heure du relèvement est 1000 et les deux amers sont représentés par des cercles noirs. Au moment du relèvement, l’un est vu à 036° (Vrai) et l’autre à 280° (Vrai).

L’approche traditionnelle pose au moins deux problèmes. Premièrement, elle nécessite une table à cartes suffisamment grande pour travailler avec des règles parallèles et un rapporteur, ou un traceur breton. Deuxièmement, la vitesse du bateau, par rapport à la capacité du navigateur à tracer, doit être suffisamment lente pour que le relèvement puisse être effectuée dans un délai raisonnable. Sur des bateaux petits et rapides, ces deux problèmes rendent l’approche inutile. Avec un peu d’organisation, il est toutefois possible d’utiliser la même idée avec peu ou pas de traçage en cours de route.
La technique de relèvement rapide
L’idée est de tracer à l’avance les relèvements possibles des amers, de manière à constituer une grille des points de repère. Cette grille est illustrée dans l’image ci-dessous. La distance à laquelle chaque relèvement doit être tracé dépend de la carte et de la proximité des repères. Ci-dessous, ils sont espacés de quatre degrés, mais un contexte différent peut justifier un espacement plus ou moins important.
Le quadrillage doit être fait à l’avance, au moment de la planification du passage, et la meilleure pratique consiste à étiqueter chaque relèvement avec sa valeur compas (ou magnétique). De cette manière, la correspondance entre la lecture du compas et la ligne appropriée peut être effectuée instantanément en cours de route.

La manière la plus rapide d’effectuer le repérage est d’aligner le bateau sur l’amer le plus logique, compte tenu des circonstances. Il suffit alors de regarder le compas du bateau pour obtenir le relèvement. En même temps, une deuxième personne lit le relèvement du second amer à l’aide d’un compas à main. Comme la grille est déjà tracée sur la carte, il suffit d’encercler une intersection pré-dessinée (image ci-dessous).
Cette technique est très rapide et ne nécessite aucun tracé en cours de route. Le fait de ne pas avoir à dessiner lorsque le bateau tangue et avance à pleine vitesse est pratique et de valeur inestimable.

La plupart des grilles formées pour cette technique se situent sur une partie relativement petite de la zone de navigation. L’impact de la position réelle sur le cap à prendre pour le prochain waypoint devrait être négligeable. Toutefois, si ce n’est pas le cas, il est possible de faire un tableau de la route à suivre en fonction de la position encerclée. Le tableau ci-dessous montre un exemple cohérent avec un waypoint situé à peu près à la coordonnée (15, 2) de la pseudo-carte.
Avec ce tableau, il n’est pas nécessaire de mesurer le cap corrigé à la volée. En fait, il n’est même pas nécessaire de dessiner quoi que ce soit sur la carte. Il suffit de lire le tableau pour en déduire le cap corrigé. Encore une fois, c’est très pratique lorsqu’il n’y a pas de table à cartes !
CTS | 268 C | 272 C | 276 C | 280 C | 284 C | 288 C | 292 C |
048 C | 113 C | 113 C | 111 C | 110 C | 109 C | 108 C | 108 C |
044 C | 115 C | 114 C | 112 C | 111 C | 109 C | 108 C | 108 C |
040 C | 115 C | 115 C | 112 C | 112 C | 109 C | 108 C | 107 C |
036 C | 116 C | 115 C | 113 C | 112 C | 109 C | 108 C | 107 C |
032 C | 117 C | 116 C | 113 C | 112 C | 109 C | 108 C | 107 C |
028 C | 118 C | 117 C | 114 C | 112 C | 110 C | 108 C | 107 C |
024 C | 119 C | 117 C | 114 C | 112 C | 110 C | 108 C | 107 C |
Relèvement rapide avec un radar
La même technique peut être appliquée avec un radar et un seul amer. Elle hérite des mêmes avantages et – en plus – il n’est pas nécessaire de tourner le bateau pour aligner le compas à l’amer. D’un point de vue conceptuel, la principale adaptation consiste à tracer à l’avance des (arcs de) cercles de distance (image ci-dessous). La grille obtenue aura un aspect différent, mais la même logique « sans dessin » s’applique. Tout ce qu’il faut, c’est un peu de préparation sur la carte.

Relèvement rapide avec plusieurs passages
La technique illustrée présente l’inconvénient d’encombrer la carte d’une grille. Elle fonctionne bien lorsqu’il n’y a que deux amers utilisés. Lorsqu’il y en a plus de deux, le tracé de la grille devient illisible. De plus, si deux relèvements relativement proches sont nécessaires, mais que l’on utilise des amers différents, le même problème se pose. Il est alors préférable de ne dessiner que les bords de la grille (image ci-dessous).
Le résultat est plus propre, mais nécessite de dessiner les relèvements à l’aide d’une règle (sans besoin de rapporteur). C’est toujours plus facile que la solution traditionnelle et c’est peut être la meilleure option dans une zone de la carte qui demande beaucoup de dessins.

Conclusion
Pour les bateaux rapides qui n’ont pas beaucoup de place pour dessiner, la technique de relèvement rapide est difficile à battre. Elle ne nécessite aucun dessin et très peu de temps pour être exécutée. Cependant, cette technique a un prix : celui de la planification. Les grilles doivent être tracées à l’avance. Si, pour une raison ou une autre, il faut s’écarter d’une route préétablie, il faudra la recalculer ou ralentir. Ou peut-être que dans le contexte, les cartes électroniques fourniront une précision suffisante.