
Ce texte se concentre sur les applications électroniques de navigation destinées aux petites embarcations. Ces applications électroniques servent à afficher des cartes marines électroniques. Si vous souhaitez des exemples concrets, ce site comprend cinq introductions à des applications différentes: Navionics (Boating), OpenCPN, C-MAP, Savvy Navvy et SEAiq. Ci-dessous, je détaille les éléments communs aux applications de navigation qu’on retrouve généralement sur les petites embarcations tels que des voiliers, des yachts, ou autre.
1. Les applications automatisent certaines tâches de navigation
Le principal avantage d’une application électronique est d’automatiser certaines tâches de navigation. On peut déterminer automatiquement la position et la vitesse du bateau, on peut construire, sauvegarder et partager des routes, on peut enregistrer le chemin réel emprunté par le bateau et elles offrent même de l’assistance en matière de planification de passage. En particulier, certaines applications affichent directement les cycles de marées. Si l’application est fiable, il n’est alors plus nécessaire de faire des calculs de fenêtre de marée à la main.
L’automatisation de ces tâches sauve du temps. On passe moins de temps à déterminer où était le bateau. Ce faisant, on peut passer plus de temps à anticiper où sera le bateau, ce qui améliore la sécurité de la navigation.
2. Il faut un appareil informatique pour les exécuter



Il faut une forme quelconque d’ordinateur pour exécuter les applications de navigation. Parfois, c’est un ordinateur embarqué (en anglais, un chartplotter). Les marques populaires sont Raymarine, Garmin ou Simrad, mais il y en a d’autres.
Ces ordinateurs sont cependant relativement coûteux (2000$ et plus) et c’est aussi une pratique établie que d’utiliser son appareil cellulaire ou encore une tablette électronique (e.g. iPad, etc.). Ces appareils ne sont pas tous égaux en matière d’usage et de possibilités. La capacité de la pile affectera la durée des passages si on a un appareil en poche. Également, la taille de l’écran sera un facteur qui affectera la facilité à planifier des routes: plus l’écran est large, mieux c’est pour la planification … mais plus il sera énergivore. Pour mentionner deux extrêmes, le Garmin inReach GPSMAP a un écran d’environ un pouce par un deux pouces. C’est tout petit, mais son autonomie à batterie est de plusieurs jours. Inversement, une tablette électronique Samsung aura un écran d’environ 11 pouces par 7 pouces. C’est plus grand, mais avec un réglage d’affichage pour le soleil, sa pile ne durera que quelques heures.
Pour les bricoleux, c’est aussi possible d’employer un micro-ordinateur tel qu’un Raspberry pi (et ce n’est pas quelque chose que j’ai testé). L’avantage est que ce n’est pas coûteux.
3. Les informations cartographiques viennent du gouvernement

Peu importe votre application favorite, si vous affichez une carte en territoire canadien, les données transmises par la plupart des applications électroniques proviennent du Service Hydrographique du Canada. Les compagnies privées opérant ces applications paient des droits d’usage en échange de l’accès aux données cartographiques du gouvernement.
En ce sens, peu importe le fournisseur d’application, vous aurez essentiellement les mêmes informations cartographiques. Il y aura des différences au niveau des couleurs ou de certains symboles, mais les cartes afficheront la même profondeur, les mêmes bouées, etc. Les seules différences relèvent du mode de mise-à-jour et de l’apparence graphique.
Pour employer une analogie, on peut préférer le Coke au Pepsi, mais c’est pareillement de l’eau, du sucre et du gaz carbonique. Les différences ne tiennent qu’à quelques ingrédients!
Je prends la peine d’écrire « la plupart » des applications plutôt que toutes, car certaines peuvent se baser sur des services tiers. Si tel est le cas, il faire preuve d’une grande prudence et évaluer la qualité des données obtenues. C’est possible que les données sur les cartes soient désuètes, erronées, ou les deux!
4. Les symboles cartographiques varient d’une application à l’autre



L’Organisation hydrographique internationale maintient un standard pour les symboles sur les cartes de navigation. Les pays qui y adhèrent font en sorte que leurs cartes soient le plus près possible du standard. Ce faisant, les cartes en papier ont le même look peu importe la portion du monde couverte (et leur provenance).
Lorsqu’il y a des différences, ces standards sont consignés dans un document intitulé la Carte #1 (Chart #1). Ce document est produit par tout service hydrographique produisant des cartes. Ci-dessous, je montre un extrait de la Carte #1 du Service Hydrographique du Canada, mais c’est également possible de télécharger le même document pour la France, le Royaume-Uni, les États-Unis ou d’autres.
Plusieurs applications de navigation électronique utilisent des symboles différents du standard international. Certaines applications offrent même la possibilité de configurer les normes d’affichage à ses goûts personnels. Ces différences sont généralement mineures, mais peuvent parfois porter à confusion. Si vous commencez à naviguer avec une nouvelle application électronique, c’est une bonne idée que de se familiariser avec son outil permettant de lire les symboles sur la carte. À cet égard, les applications diffèrent grandement: certaines applications ne permettent pas d’afficher toutes les informations liées aux symboles, alors que d’autres offrent énormément de détails. Les différences les plus importantes concernent la bathymétrie, la profondeur de l’eau et les dangers « naturels » à la navigation (roches à fleur d’eau, etc.).
5. L’appareil doit être muni ou connecté à un GPS
Finalement, l’appareil doit être connecté à un GPS, ou être muni d’un GPS intégré. Autrement, il sera impossible de connaître la vitesse et la position de votre bateau! Similairement, il ne sera pas possible d’enregistrer la route réelle qu’aura pris votre voilier. Ce faisant, votre application électronique de navigation se résume alors à l’affichage de cartes.
Fait notable, les iPads n’ont un GPS intégré que sur les modèles incluant une puce cellulaire. Si on souhaite dédier une tablette électronique à une application de navigation, il faut assurément vérifier qu’un GPS est inclus avec la tablette.
Les ordinateurs portables (Mac ou PC) permettent d’utiliser certaines applications de navigation (e.g. OpenCPN, SEAiq). Règle générale, ces ordinateurs n’ont pas de GPS intégré. Une pratique consiste à acheter un GPS externe qui peut se connecter via un port USB, puis de s’assurer que l’application puisse « voir » le GPS. Cette approche demande de configurer l’application, l’ordinateur ou les deux! Une autre pratique est de brancher votre ordinateur au réseau NMEA de votre voilier, si vous en avez un, et il faut être prêt à bricoler un peu.
6. L’application affiche la position du récepteur GPS

Votre application affichera les données reçues par votre récepteur GPS. Si ce récepteur est installé sur votre voilier, ce sera alors intrinsèquement la position et la vitesse du voilier. Par contre, si vous employez un téléphone cellulaire ou une tablette mobile avec un GPS intégré, l’application affichera la position et la vitesse … de votre appareil. La différence est importante si vous marchez sur votre bateau (ou sur le quai) alors que vous lisez les informations sur la vitesse et la position. Si vous marchez dans la direction du bateau, votre vitesse affichée sera plus grande que si vous êtes à l’arrêt sur le bateau.
Similairement, la route réelle empruntée qui est enregistrée est celle de l’appareil… et non du voilier. L’image à gauche, une copie d’écran de la route enregistrée avec C-MAP, illustre bien la différence entre les deux.
Le comportement erratique au milieu de l’image n’a rien à voir avec les capacités de la personne à la barre! Au contraire, les zig-zag montrent plutôt l’effet combiné du bateau et du téléphone cellulaire qui enregistrait la route. Ce téléphone était dans ma poche alors que je faisais des va et viens sur le pont.
Bref, l’appareil mesure la position du récepteur GPS. Si ce récepteur bouge par rapport au bateau, les informations seront légèrement faussées.
7. Il n’est pas nécessaire d’avoir de données cellulaires
La plupart des applications de navigation ne requièrent pas de données cellulaires pour naviguer. Il faut cependant télécharger les cartes de navigation d’avance, ce qu’il faut faire avec une connexion wi-fi ou à l’aide d’un forfait de données.
Certaines applications offrent des abonnements aux cartes qui sont moins coûteux mais qui ne permettent pas de télécharger les cartes. Autrement dit, cette forme d’abonnement requiert une connexion cellulaire. Il va sans dire que ce n’est pas une bonne pratique que d’utiliser ces abonnements pour de la navigation à plus de cinq milles nautiques des côtes. Après quoi, on perd la réception cellulaire.
En cas d’urgence, tout appareil muni d’un récepteur GPS affichera les coordonnées GPS sans connexion cellulaire… et sans application électronique de navigation. Il suffit de télécharger une application affichant les coordonnées de longitude et de latitude. Évidemment, il faut alors savoir reporter ces informations sur une carte en papier.
8. Il est sage d’avoir de la redondance
Qui dit appareil électronique portable dit également qu’il est possible de le perdre, de l’échapper à l’eau, qu’il est possible de manquer de batteries, ou encore qu’il est possible qu’il se brise. Il m’est arrivé d’échapper un appareil à l’eau, ou de ne plus être capable de le charger parce que trop exposé à la pluie.
De fait, c’est une pratique sécuritaire que d’avoir un deuxième appareil avec une application installée, à jour, et avec des piles chargées. Similairement, c’est une bonne pratique que d’apporter plus d’un câble de chargement, et une pile externe permettant de le recharger.
9. Il est sage d’apporter son propre appareil
Si vous naviguez sur le voilier d’un autre, les capacités et l’état des cartes électroniques du système embarqué seront inconnues jusqu’à ce que vous soyez à bord. Les appareils électroniques sont assujettis aux réparations et bricolages électriques fait par d’autres. Il n’est pas impossible de faire face à des écrans brisés, des breakers qui sautent, ou des cartes qui ne sont pas à jour. Si la navigation dépend d’un appareil électronique d’un autre, c’est une bonne idée que d’apporter le vôtre.
10. Légalement, il faut toujours des cartes en papier
Les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l’Australie reconnaissent que les applications électroniques sont des substituts acceptables aux cartes en papier. De fait, les pays limitrophes (notamment dans les Caraïbes) suivent les grandes puissances maritimes. Au Canada, ce n’est cependant pas le cas pour les plaisanciers.
Pour les navires de plaisance, le Règlement sur la sécurité de la navigation précise qu’il faut avoir des cartes en papier d’une échelle appropriée à bord, à moins de connaître le plan d’eau sur lequel on navigue. Il faut ici comprendre que si on navigue à répétition dans des eaux connues, il n’est pas nécessaire d’avoir des cartes. Mais si on voyage dans de nouveaux plans d’eau, les embarcations canadiennes de plaisance doivent avoir des cartes en papier.
Je suis de ceux qui pense que cette obligation réglementaire devrait changer, notamment pour suivre la pratique de la grande majorité des plaisanciers, et autoriser les applications électroniques. Cela dit, ce n’est pas encore le cas et si on veut se conformer à la loi, il faut du papier à bord (et plus généralement les publications nautiques). Pour suivre l’évolution de la navigation électronique au Canada, on peut se rendre au portail e-navigation de la Garde côtière du Canada. En particulier, la page détaillant la feuille de route gouvernementale illustre bien les défis de la transition vers l’électronique.
11. Vous ne verrez que la route et que la vitesse sur le fond
À moins que votre application de navigation soit connecté à un compas fixé à votre voilier et à votre loch, vous ne verrez que votre route sur le fond (COG: cours over ground) et votre vitesse sur le fond (SOG: speed over ground). Succinctement, ces informations indiquent dans quelle direction va le bateau (par opposition à où il pointe) et à quelle vitesse va le bateau par rapport à la terre. Si ces concepts vous sont étrangers, je vous encourage à prendre un cours de navigation.
Avec une tablette ou un appareil cellulaire, il est ainsi impossible de connaître votre vitesse sur l’eau, ou votre dérive causée par le courant. Pour estimer ces informations, il faut le faire à la main, ou brancher votre application aux instruments du voilier.
12. Il y a deux modèles de tarification
Les applications électroniques de navigation fournissent essentiellement deux services, soit 1) d’afficher les cartes de navigation; et 2) de fournir un logiciel convivial avec des fonctions additionnelles. Du point de vue de l’usager, ces deux choses sont presque les mêmes: utiliser l’application implique nécessairement d’afficher des cartes. Or, du point de vue de la production, ces services sont complètement différents: le logiciel est produit par une compagnie privée, mais les cartes sont produites par le Service Hydrographique du Canada (ou un autre service hydrographique ailleurs dans le monde).
Certains services hydrographiques, comme la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA, aux États-Unis) ou le Service Hydrographique néozélandais, rendent leurs cartes accessibles gratuitement au public. Pour la majorité des autres pays, notamment le Canada, les services hydrographiques vendent cependant leurs produits à des revendeurs ou fournisseurs par le biais de contrats de service. Cela inclue notamment les compagnies produisant les applications électroniques de navigation.
À cause de cette différence quant à la source de production, les compagnies optent pour des modèles tarification différents.
L’abonnement mensuel
Le premier modèle – le plus courant – consiste en une application qu’on peut télécharger gratuitement, mais qui demande un abonnement annuel pour utiliser un groupe de cartes. Avec un seul tarif, l’application recoupe ainsi ses coûts contractuels au Service Hydrographique, mais également les frais de développement et d’entretien de l’application.
L’achat du logiciel et des cartes
Le deuxième modèle sépare les coûts de production du logiciel des coûts rattachés à l’usage des cartes. Il faut dans ce cas payer pour l’usage du logiciel et payer un montant additionnel si le service hydrographique demande de payer pour leurs services.
Ce modèle de tarification est plus clair, car il montre bien que si les cartes sont disponible gratuitement, comme aux États-Unis, les seuls frais à payer sont ceux du logiciel. En revanche, un abonnement annuel cache le fait que certaines cartes sont gratuites pour le concepteur de logiciel.
Conclusion
Les applications électroniques de navigation sont de formidables outils pour automatiser certaines tâches de navigation. Elles ne dispense cependant pas des obligations du navigateur à pouvoir faire ces tâches manuellement, ni à planifier ses routes. Comprendre leur usage et leurs limites permet aussi de mieux se les approprier. Ce texte, couvrant plusieurs généralités, vise un ensemble large d’applications souvent disponibles sur les petites embarcations, ou sur les embarcations de plaisance.
Pour les spécificités propres à chaque application, on peut se référer à la section Apprendre de ce site. Il comprend des textes sur les applications Navionics (Boating), OpenCPN, C-MAP, Savvy Navvy et SEAiq. On y couvre notamment comment faire huit tâches essentielle de navigation, à savoir comment:
- se procurer des cartes;
- lire des symboles sur une carte;
- planifier une route;
- sauvegarder la route réelle empruntée;
- obtenir sa vitesse et sa route sur le fond;
- obtenir les informations de courants et de marées;
- échanger des routes déjà créées;
- planifier et exécuter des routes.
Leur lecture est plus pratique et centrée sur l’usage de chacune des applications.
4 Responses
[…] Ce premier texte couvre l’application Navionics (Boating). Les autres textes couvrent respectivement OpenCPN, Savyy Navy, C-MAP et SEAiq. En lecture préalable, c’est une bonne idée de lire le texte d’introduction aux cartes électroniques et le texte d’introduction aux applications électroniques de navigation. […]
[…] qu’une tablette ou un téléphone cellulaire doté d’un GPS. À cet égard, le texte Introduction aux applications électroniques de navigation, de même que le texte d’introduction aux cartes électroniques sont de bonnes lectures […]
[…] Avant d’entreprendre la lecture de ce texte, c’est une bonne idée de lire le texte Introduction aux applications électroniques de navigation, car il s’applique à l’ensemble des applications de navigation. C’est aussi une […]
[…] les formats de cartes électroniques. C’est aussi une bonne idée de lire le texte Introduction aux applications électroniques de navigation. Il vous aidera également à faire bon usage de C-MAP ou des autres applications de […]